Je parle jamais musique, j’abuse. En fait à chaque fois que je veux me lancer dans un post sur un sujet, je peux partir pour 3 heures, ce qui n’est pas trop possible.
Je viens de finir le bouquin sur sa vie, "La vie extraordinaire et tragique de Jaco Pastorius" par Bill Milkowski. Quelle fin abominable. Quel bassiste. Beaucoup dises que c’est les drogues dont l’alcool qui l’ont tués. D’autres que ce sont les femmes (il en a eu trois), d’autres que ce sont les histoires qui en découlent (ne plus voir ses enfants une fois séparé)… Moi mon avis perso, c’est que c’est cette foutue religion qui l’a eu.
Parce que Jaco était un fervent catholique, son arrivée au sommet, le style de vie du show business (et j’imagine mi 70s) l’ont déboussolé. La religion s’insinue et crée cette sorte d’extrémisme qui fait que soit tu touches à rien de ce qu’on te propose, soit tu y vas pied au plancher. Soit tu pêches pas, soit tu pêches à donf. Le tout avec la culpabilité qui va avec. C’est tellement vrai pour d’autres artistes de cette époque que je comprends pas pourquoi on le dit pas plus. C’est d’aillleurs pourquoi peu en sont sortis indemne.
Bref le père Jaco ne touchait à rien et jouait jouait jouait durant des heures, des tournées en Floride et son but de devenir le meilleur bassiste de la planète s’accomplissait, il avait une vingtaine d’années. Quel putain de culot quand même. Il était si énergique que quand il ne jouait pas de basse il faisait du sport, baseball, basketball etc… constamment. Une pile. Et puis en entrant chez Weather Report et dans la légende, il a commençé à boire. Macho man, bataille de celui qui encaisserait le mieux une cuite avec Joe Zawinul, etc… Le genre de conneries qu’aujourd’hui, les enfants du capitalisme ont testés avant la vingtaine. Mais quand t’as trainé ton cul de grenouille de bénitier dans les églises durant les 60s, tu testes ça à 30 ans. Et ça te ruine. Bingo. Autant il accomplira ses meilleures prestations bassistiques live à cette époque, autant il commence à débloquer car la vie de tournée n’est pas facile non plus. Sa femme et son enfant lui manque et quand il divorcera, cela l’emmènera à siffler encore un peu plus de bières. Et ainsi de suite. Sans compter ses extravagances (courir à poil sur scène, prendre un solo et démollir complètement le morceau, claquer les avances dans tout et n’importe quoi) le jazzrock étant de moins en moins côté, l’industrie du disque lui tourne le dos fin 70. Et Jaco de plonger dans la coke.
En même temps comme dis Mike Stern (guitariste et pote de Jaco) que j’ai vu au Parc Floral de Paris cette année que je me disais qu’il avait dû bien se mettre dans sa jeunesse vu la tronche, "a cette époque, TOUT les musiciens étaient cokés". En même temps c’est déjà mieux que l’héroïne qui trainait dans les années 40s. Il faut savoir que la coke/alcool font très bon ménage dans le sens qu’ils s’annulent plus ou moins et que du coup tu peux en prendre plein. Enfin j’ai pas testé mais à ce que j’ai pu voir, c’est ça. Oui c’est con. Mais c’est comme ça que les 80s vont passer pour Jaco et tant d’autres.
Jaco après avoir été au top du monde, tournées mondiales sur tournées mondiales, élu meilleur bassiste plusieurs fois, était durant les 80s un poivrot qui dormait dans les rues de New York, à moitié dingue à jouer au basket toute la journée avec les clodos du coin et à jouer de la basse le soir avec les potes qui voulait bien de lui dans les bars Jazz de la grosse pomme. C’est à dire de moins en moins. Car tout le temps bourré et sans aucune capacité à se gérer. Il finira défoncé par un videur un matin de 87 (Perte d’un œil, et de son bras gauche tellement il se fera tabassé la gueule). Il mourra quelques jours plus tard, uns fois les machines débranchées.
Je raconte ça parce que si vous avez entendu ses lignes, mélodies, cette façon unique de toucher la basse, cette dextérité, cette maturité, cette maitrise absolue de l’harmonie… C’est pas possible de l’autre côté, d’être à la masse, de finir comme ça. Ca colle pas. J’arrive toujours pas à le croire. Ce type aurait été libre dans sa tête, sans dogme religieux de merde (il s’est pris pour Jesus un moment), il aurait surmonter ces histoires et ces moments difficiles de la vie. Et en 2005, qu’est ce qu’il nous ferait ?.. Dommage. En tout cas il nous a laissé des morceaux de fou. Et à chaque fois que j’ai un peu mal au poignet sur ma basse je me dis "mais genre, regarde ce petit fluet de Jaco qui te owne en résistance; vazy bouges" et je me remets à bouger mes doigts, avec une petite pensée pour ce grand homme.
Peace man.