Un excellent article de Gamekult encore une fois. Je le cc parce que cette réflexion est tellement rare qu’il faut la diffuser. Et perso ça me taraude quand même un peu. Pourtant j’essaie de faire comme si de rien n’était "non mais c’est tout à fait normal ces jeux WWII&Def Jam bidule…"
Par Emmanuel Delune Arrivé dans le monde de la presse jeu vidéo par l’intermédiaire de feu le magazine PC Force, Emmanuel Delune est rédacteur depuis près de 8 ans maintenant dans divers médias papier ou Internet (Generation 4, Gameone.net, Trash Times). Il a co-fondé et dirigé le site Gamedata.com, et anime actuellement le site Resetmag.com, webzine consacré au cinéma, aux DVD et aux jeux vidéo…
Jeux vidéos et stéréotypes
L’annonce récente de la résurrection du projet Prey, revenu d’entre les morts après un hiatus de presque 7 ans, a bien sûr fait naître de nombreuses réactions chez les joueurs. Parmi les commentaires amusés ou sarcastiques liés à cette renaissance tardive, ou ceux, légèrement plus enthousiastes, qui ont suivi la présentation du jeu à l’E3, on pouvait aussi trouver quelques surpris qui se demandaient, sincères ou un peu désabusés, ce que le choix d’un héros amérindien pouvait bien apporter au jeu, à l’image d’un Turok où ses origines ethniques n’ont finalement rien à apporter au gameplay en tant que tel. Même si les exemples sont différents, le personnage de Turok étant né dans un comic book, quelques joueurs se sont assez légitimement posé la question qui tue : et si tout ceci n’était finalement qu’une galipette commerciale de plus, destinée à exploiter un créneau "inhabituel" et à nous changer du tout-venant des FPS dont les héros, pour la plupart blancs, WASP et invariablement héroïques, n’ont plus rien d’étonnant à nous offrir. Doute renforcé par la présence aux rangs de producteur du studio texan 3D Realms, qui a rarement fait dans la finesse, mais qui jure à qui veut bien l’entendre s’être longuement documenté sur les us et coutumes des natifs de cette population désormais indigène, rebaptisant au passage le personnage principal. Au lieu d’un "Talon Brave" un brin mystique, nous incarnerons donc "Tommy Hawk", au nom commercialement beaucoup plus punchy, et surtout plus acceptable. Bref, une fois la cascade de plumes de vautour retombée, nous voici bien dans un univers de pacotille, probablement aussi légitime aux yeux des Amérindiens que l’utilisation souvent réactionnaire qui a été faite de leur ethnie dans les films de cow-boys des années 30 à 50.
Avec Tommy l’Indien se pose une question qui, en fait, taraude le jeu vidéo depuis sa création, ou presque. 86% des héros de jeux sont mâles et blancs, nous dit une étude menée en 2001 par le groupe Children Now, qui précise également que 8 Afro-Américains sur 10 sont représentés – à l’époque – comme des compétiteurs dans des jeux sportifs (foot américain, basket, golf, etc.), que les Latinos sont confinés à de mini apparitions dans des jeux de base-ball, et que 7 personnages asiatiques sur 10 sont, soit des combattants dans des jeux de baston, soit des sumotoris et des lutteurs. Le jeu vidéo est blanc et le fait savoir. La situation a aujourd’hui quelque peu changé, quelques titres osent timidement le héros ethnique (Shadow Man, GTA : San Andreas, Niobe dans Enter the Matrix…, en dehors de certains titres qui vous laissent choisir), sans toutefois que l’industrie ne connaisse de véritable et profonde remise en question. Même dans les jeux japonais l’identité culturelle semble s’effacer au profit d’une vision globalisée de l’être humain. Les héros sont blonds, ont la peau claire, de grands yeux bleus ou noirs, rarement les traits de leurs concepteurs, encore moins du public à qui ils s’adressent en majorité. La globalisation n’a décidément pas que des avantages, surtout quand le coeur de cible, lire "les acheteurs potentiels de nos produits", sont à l’Ouest. Pour un Dee-Jay ou un Fei Long dans Street Fighter, pour un Ryo dans Shenmue aux traits assez typés, combien de Léon, de Raiden, de Solid Snake, de Cloud, aux facies aussi génériques qu’occidentalisés ? Pour un Diego Chavez dans un Rainbow Six (et encore, Red Storm dépendait des personnages du roman de Tom Clancy), combien de suspects automatiquement black ou latinos dans des jeux de ce type ? Quid de tous ces softs où l’étranger devient l’ennemi idéal, où le vilain terroriste qu’il soit Mexicain ou Arabe, est la cible rêvée : Delta Force, Command & Conquer : Generals, Act of War, Kuma War, Conflict: Desert Storm – Back to Baghdad. Des jeux où l’on réécrit l’histoire à l’aune d’une propagande étatique et d’un patriotisme pour le moins gerbant, où l’on fait du joueur le glaive d’une justice à oeillères qui dresse un portrait pour le moins limite de nations "sous-développées", où tirer sur les "bronzés" devient presque une sorte de catharsis. Et Mario, ce bon Mario, n’est-il pas l’essence même de la caricature moustachue du plombier italien, avec sa salopette bariolée ?
On sait que le jeu vidéo a souvent été taxé, et parfois à juste titre, de sexisme voire de misogynie, et pourtant personne ne s’émeut que certaines communautés, races, ou groupes de personnes, soient dépeints de façon aussi caricaturale et grossière par certains produits qui ne s’embarrassent même plus de précautions et utilisent pleinement les ficelles du populisme pour atteindre le coeur de leur cible. Mais au-delà de la simple polémique ou de la provocation un peu facile à la façon d’un tonitruant "le jeu vidéo est-il raciste", se posent toutefois deux problèmes : premièrement, cette caricature systématique de certaines "minorités" n’a-t-elle pas une influence, directe ou indirecte, sur le mode de pensée des joueurs, ou du moins leur perception de la société ? C’est ce que semble penser Joe Morgan, un exécutif noir et new-yorkais qui s’inquiète, dans un article du New York Times daté d’août 2004, de ce que ces stéréotypes finissent par avoir, notamment sur les jeunes joueurs incapables de percevoir la différence entre la réalité et une "peinture satirique" de cette réalité, une très mauvaise influence. Pour les éditeurs ou développeurs, tout cela n’est que fadaises. Les jeux ne sont que des cocktails issus de la culture populaire, qui utilisent les recettes les plus appréciées par les joueurs, les mêmes que certains produits culturels dits de grande consommation – films, clips, comics – utilisent régulièrement. Faut-il parler de causalité immédiate, comme on a pu le faire assez maladroitement pour la violence ? Pour Joe Morgan, ces jeux représentent l’équivalent moderne des "minstrels shows", ces spectacles du début du siècle dans lesquels des acteurs blancs aux visages peinturlurés imitaient et parodiaient les noirs, pour qui il était alors interdit, ségrégation oblige, de jouer dans des films américains. Et même si le premier acteur noir jouera dans un film dès 1914, il faudra attendre les années 50, puis le militantisme de gens comme Sydney Poitier, pour qu’ils s’affirment dans cet art désormais majeur. Le jeu vidéo en serait-il finalement au même point, ou presque, que le cinéma au début de son histoire ? [ndharold: ca se tiens ;p]
Deuxième interrogation, qui touche au portefeuille et touchera donc beaucoup plus des éditeurs peu concernés par des problèmes d’ordre moral, comment un média de divertissement dit "de masse" peut-il espérer prospérer et survivre s’il continue à s’aliéner de la sorte toute une partie de la population ? Après tout, si les logiciels de jeux veulent être assimilés à des "produits culturels" – qualité pour l’instant déniée au grand dam du SELL qui aimerait bien faire baisser la TVA des jeux à 5,5% – ce grade se doit d’être suivi de faits concrets dans bien des domaines, celui de la représentation des minorités ethniques en particulier. Bien sûr, inutile de parler de celle des handicapés, des malvoyants, etc., on touche au grotesque, mais là encore le jeu vidéo semble n’être qu’un des éléments d’un problème de représentation médiatique plus global, non une des causes. Faudra-t-il que tous ces groupes s’organisent un à un en lobby et décident de frapper, comme l’association de sinistre mémoire Familles de France, les éditeurs là où ça fait mal, c’est-à-dire droit dans le profit ? Le problème, en tout cas, est réel. Dans un rapport daté d’octobre 2000, un groupe de travail de la commission européenne faisait l’analyse suivante : "Les médias traditionnels ont certes un rôle à jouer dans la lutte contre le racisme et l’intolérance, mais leur importance dans la diffusion de l’information diminue face au développement des nouvelles technologies (…). Chaque individu, chaque groupe est aujourd’hui en mesure de toucher un vaste public, pour le meilleur et pour le pire, ce qui l’oblige à veiller à promouvoir l’entente dans la société. Dès lors, les initiatives d’éducation et de formation doivent cibler le grand public, qui se pose à la fois en destinataire et en diffuseur de contenu. Elles devraient aussi développer l’esprit critique face aux nouvelles technologies, y compris Internet, les jeux vidéo et la musique." Bref, nos chers développeurs, ne manqueraient-ils pas un peu de maturité ?
Bien sûr le sexisme, les discriminations ou la xénophobie ne sont jamais exprimés ouvertement : ils sont larvés, latents. Le contraire leur vaudrait évidemment l’opprobre et la colère de la justice, sans même parler des associations. Nous ne parlerons donc pas des titres ouvertement racistes types parodies Flash et autres instruments de propagandes vendus sous le manteau, et espérons-le destinés à le rester, même si paradoxalement un tel mal est plus facile à combattre car instantanément reconnaissable. Si les organismes comme le PEGI (Pan European Game Information) ou le SELL en France veillent au grain et apposent leurs étiquettes sur les boîtes de nos jeux afin d’en expliciter le contenu aux braves mères de famille pas toujours au fait du dernier hit à la mode, et si la discrimination raciale est bien considérée comme l’une des 6 thématiques à notifier dans ces fameux labels, au côté de la violence, du sexe ou encore des abus de langage, on peut se demander si ce CSA de fortune remplit pleinement son rôle, en tout cas de manière satisfaisante. Certes, GTA : San Andreas est bel et bien interdit aux moins de 18 ans, pourtant uniquement pour des raisons de sexe et de langage. Comment expliquer en quelques mots, ou via un logo simpliste, que l’image que donne le jeu des ghettos noirs américains n’est en rien
représentative de la réalité, qu’elle n’est que la distorsion d’un prisme médiatique qui n’aime rien de mieux que le spectaculaire et l’immédiateté, que ce déferlement de violence et de gros mots faussement provoc est principalement destiné à assimiler le produit à toute une mythologie du gangstérisme noir, vantée et véhiculée par des dizaines de films ou de clips, qui pourraient bien, encore plus que les jeux eux-mêmes, être l’une des raisons du problème. Comment expliquer en quelques phrases laconiques, imprimées en petits caractères, que les femmes, noires de surcroît, ne sont pas, au choix, des mamas bienveillantes ou des objets sexuels voire des prostituées, diptyque psychanalytique bien connu sous le nom de la "maman et la putain", et qu’on nage dans le pur divertissement, aussi contestable soit-il, mais finalement pas moins étrange, dans son contexte de média interactif, qu’un massacre de nazis dans un labyrinthe en 3D nommé Wolfenstein.
Il ne s’agit pas bien sûr de stigmatiser GTA : San Andreas, jeu par ailleurs réellement excellent, auquel il n’est pas interdit de prendre un pied monstrueux sans que l’on soit pour autant un néo-nazi, un raciste qui s’ignore, ou un bigot de premier ordre. D’aucuns pourraient d’ailleurs me répondre, et c’est souvent l’argument numéro 1 invoqué pour défendre leur cause, que rien dans le jeu n’est crédible, pas plus que ne sont réels les champignons hallucinogènes d’un Mario Bros, les gunfights d’un Max Payne ou les crises de nerfs des Sims. Que tout ça n’est pas bien sérieux, que Rockstar joue précisément sur ces clichés en pleine connaissance de cause, et donc que tout ceci serait sans réelles conséquences, si toutefois on est complice de la parodie, et donc capable d’observer tout cela avec un certain recul. Comme la blaxploitation (*) dans les années 70, l’utilisation par certains développeurs de toute une imagerie aussi trompeuse que discutable commence toutefois à poser problème, et il serait assez irresponsable de vouloir l’ignorer. Def Jam Fight For NY et son univers de gangsta rappeurs embagousés, 187 Ride or Die et ses drive-by shooting sur fond de "urban rap", GTA : San Andreas et sa description d’une communauté composée presque uniquement de dealers, d’allumés de la gâchette ou de prostituées en devenir, émeuvent une partie des associations luttant contre la discrimination, comme la NCAAP (National Association for the Advancement of Colored People) qui a récemment fait par à Electronic Arts de son rejet absolu des poncifs véhiculés par son jeu de baston console. Alors, pudibonderie abusive ? Manque de recul ou de second degré ? Une fois encore, comme disait feu le génial Pierre Desproges, la situation appelle le fameux "on peut rire de tout, mais pas avec tout le monde".
Ce qui passe aux yeux du "gentil blanc" que je suis pour du second degré provoc et rigolard, et que pas une seule seconde je n’assimilerais à une représentation de la population noire américaine – représentation après tout, assez conforme à celle véhiculée par les robinets à clips RnB type MTV et MCM – choque en revanche ceux qui, victimes de ces discriminations et de ce symbolisme ultra-réducteur, luttent quotidiennement pour qu’enfin leur population, leur race, ou leur sexe, soit reconnus comme autre chose que des fantasmes collectifs tout juste bons à faire vivre des producteurs qui n’ont aucun autre souci que celui d’attirer le consommateur, c’est-à-dire nous, via ces clichés aussi récurrents que confortables. Et ce qui passe aux yeux de certains pour une tempête dans un verre d’eau peut aussi participer d’un certain besoin d’affirmation : dire "merde" aux mythes du Chinois roi du kung-fu, du Japonais obsédé par des écolières en socquettes, ou du jeune noir américain qui doit, pour s’en sortir, adopter l’attitude Menace II Society. La réponse viendra peut-être de l’Académie de Baltimore, où vient d’être créé un programme destiné à enseigner la programmation à des jeunes gens noirs et hispaniques. Leur but ? Eduquer ces futurs développeurs, leur permettre de raconter d’autres histoires, moins ethno-centrées autour d’une seule et même conception de la société, de faire entendre les voix de ces gens issus de milieux différents, et peut-être faire prendre conscience à l’industrie qu’il est temps de se retourner et de voir tous ceux qui sont laissés de côté par une locomotive lancée à pleine allure sur les rails de la rentabilité immédiate. La vache, c’est beau comme du Patrick Fiori.
Comme la blaxploitation à son époque, se pose donc une fois encore le problème de la frontière entre l’utilisation, "l’objectivation" d’un cliché et d’une caricature à des fins commerciales, et la pérennisation de ces stéréotypes, qui, au final, pourraient finir par représenter la réalité même lorsqu’ils sont utilisés de manière satirique ou parodique. Parfois dans les extrêmes : Redneck Rampage et ses culs-terreux texans, Postal 2 et ses islamistes-talibans en turban, Shadow Warrior, son héros-ninja et ses aphorismes très douteux qui ont fait à l’époque grincer des dents de la communauté asiatique. Ou comment on en revient à 3D Realms, dont le Tommy Hawk a décidément fait naître bien des questions dans mon petit crâne surchauffé. Autre exemple connu, GTA : Vice City, toujours eux, qui avait attisé l’ire de la communauté haïtienne en novembre 2003, certains de ses représentants appréciant plus que moyennement être dépeints comme des dealers de drogue en puissance, dont la mort rapportait au joueur, outre d’immenses satisfactions dénuées de tout préjudices raciaux (saleté de %¨@! de mission), un paquet d’argent et d’influence. A jouer avec le feu tout en se défendant d’avoir voulu attiser la polémique, Rockstar flirte avec le bon goût, mais s’en sort sans trop de casse, et un brin de censure plus tard (lire la news), tout est rentré dans l’ordre. Sauf que la censure, est-ce vraiment ce que nous cherchons ? Ne faudrait-il pas lui préférer un certain sens des responsabilités, qui éviterait d’en arriver à ces postures extrêmes, et forcément passionnées ? Vice City pose finalement à la communauté haïtienne les mêmes problèmes que la série Les Sopranos a pu le faire aux Italo-Américains : en jouant sur des stéréotypes, et quand bien même ni le jeu ni la série ne disent à un seul moment que ces populations sont telles que représentées fictivement, pourrait naître une image déformée, fausse, des communautés en question. Le problème est sans fin, et fait naître les craintes d’un politiquement correct absolu, voie extrême généralement empruntée quand toutes les médiations ont échoué et que la pression, le lobbying ou les menaces sont les derniers recours. Espérons donc une prise de conscience assez rapide que quelque chose est peut-être en train de se jouer, et que le public, même celui issu de "la majorité", a peut-être envie d’autre chose que de paternalisme post-colonialiste, de relectures historiques à sens unique, ou d’univers virtuels peuplés de clichés sur pattes. Après tout, incarner des trolls, des aliens, des morts-vivants ou des mutants venus d’autres planètes, cela ne devrait-il pas nous inculquer la tolérance et le respect d’autrui, quel que soit sa couleur de peau, son origine sociale, ou le nombre d’antennes qu’il a sur la tête ?
Ce qui est le plus dérangeant, peut-être, n’est pas tellement cet état de fait, mais qu’aucun des grands créateurs de jeux vidéo ne semble se poser le problème [ndharold: chez Quantic ils ont l’air d’y avoir pensé ;)]. Non pas en créant un jeu pour telle ou telle minorité, telle ou telle communauté, tel ou tel groupe de personnes : précisément en évitant ces erreurs du passé, un temps hélas bien actuel où les jeux ont été conçus à destination du public majoritaire, blanc, aisé, mâle, vingtenaire. Y aurait-il une absence de gens issus des minorités parmi les grands noms du métier ? C’est indéniable. Jason Hall, Justin Chin, Corrine Yu, Derek Smart sont quelques-unes des figures reconnues et publiques à être issues de ces communautés, mais eux non plus n’ont pas tenté, ou réussi, à inverser la donne. Plus prosaïquement, la question que l’on pourrait légitimement se poser est sans doute celle-ci : dans sa phase d’industrialisation à grande échelle, car il est passé plus rapidement que n’importe quel autre "art" moderne de sa phase expérimentale à sa phase commerciale, le jeu vidéo n’aurait-il pas oublié de se démocratiser, au lieu de s’adresser, que ce soit en termes de sexe ou d’ethnies, toujours au même public : celui avec un portefeuille. Avec, en sous-texte, l’idée qu’il ne deviendra un média fédérateur, et donc moins sujet aux débats réducteurs dont il est lui-même couramment victime, que quand il prendra lui-même conscience, à travers la représentation qu’il fait de notre société, de sa multi-ethnicité et de sa pluri-culturalité. En clair, et en moins pompeux, pour que le jeu vidéo cesse d’être la cible des attaques moralistes et rigoristes dont il est coutumier – le jeu vidéo tue, abrutit, ségrégue, isole, désocialise – peut-être est-il temps qu’il se montre un peu plus responsable, moins adolescent, moins tourné vers ces stéréotypes qu’il entretient pourtant avec une flamme qui n’a d’égale que la taille affriolante des bonnets des babes de l’E3 – ou comment essayer de passer pour un média adulte en recourant à des ficelles publicitaires dignes de calendriers pour camionneurs. Comme d’habitude, le débat est lancé, avec beaucoup de questions qui appellent peu de réponses : il ne s’agit pas en tout cas de vouloir faire du communautarisme, d’imposer des quotas, ou de militer pour une "discrimination positive" vidéoludique. Mais de faire un simple constat : le jeu vidéo ne sera pleinement un art, et surtout un art mature, que quand il représentera dignement, et sans tous les stéréotypes actuels, les populations et les communautés qui sont aussi, après tout, les destinataires d’un média censé s’adresser à tout le monde.
Is that clear ?